Parcours d’un banquier

Paul DERREUMAUX

Economiste et Consultant indépendant.

Président d’honneur du Groupe BANK OF AFRICA

 

Paul Derreumaux cultive une grande affection pour le continent africain, dont il défend inlassablement la cause, et plus particulièrement pour le Mali.


Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et titulaire d’un DESS de sciences économiques, il commence sa carrière à l’Université de Lille, avant de rejoindre en 1976 la Côte d’Ivoire où il sera pendant trois ans conseiller au Ministère du Plan, puis conseiller au cabinet du Ministre de l’Économie, des Finances et du Plan.

De retour en France pour quelques années, il n’en quitte pas pour autant le continent, travaillant quelques mois à la Caisse centrale de coopération économique, puis dans une société parisienne, où il est chargé du montage d’investissements en Afrique et du conseil économique auprès de gouvernements africains.

À partir de 1982, il développera le réseau de la BANK OF AFRICA à partir de sa première implantation au Mali. Président Directeur Général du Groupe depuis sa création, Paul Derreumaux a quitté ses fonctions en janvier 2011. A cette date, le Groupe BANK OF AFRICA était implanté dans 14 pays d’Afrique Sub-Saharienne et en France

Paul Derreumaux reste à ce jour administrateur du holding et administrateur ou président de plusieurs filiales géographiques des BOA.

Auteur de plusieurs publications parues dans la presse économique (Jeune Afrique, African Banker, RB Revue Banque…°) et co-auteur du livre « Calcul des probabilités : exercices corrigés, rappels de cours » (Sirey, 1976)

  • Officier de l’Ordre National du Mérite français
  • Commandeur de l’Ordre National du Niger
  • Commandeur de l’Ordre National du Benin
  • Chevalier de l’Ordre National du Mali
  • Président du Club des Dirigeants de Banques d’Afrique Francophone en 1997
  • Conseiller du Commerce Extérieur de la France depuis mars 1988

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Discours de Paul Derreumaux

le 6 octobre 2009 à l’occasion de la remise des Trophées African Banker à Istanbul, en Turquie

 

Paul Derreumaux, le président et Fondateur de Bank of Africa, l’un des pionniers de la banque africaine a reçu, le 6 octobre 2009, le Trophée « Carrière exemplaire dans la Banque » pour sa contribution exceptionnelle au développement du secteur bancaire sur le continent.

Lorsque je finissais mes études, dans le Nord de la France, en 1970, j’avais le souhait de partager équitablement mes années de travail entre trois régions du monde qui m’attiraient : l’Afrique, l’Amérique du Sud et l’Asie. Près de 40 ans après, cette ambition apparaît définitivement compromise, sauf si la médecine fait de très grands et rapides progrès, puisque mon activité sur le continent africain m’a absorbé depuis 1976. Mais cette orientation imprévue de mon existence m’a apporté d’autres joies et celle de ce jour est une des plus fortes.

La distinction que votre jury a bien voulu me décerner est très lourde à porter, d’abord parce qu’elle est prestigieuse, mais aussi parce qu’elle semble surtout couronner un passé honorable et un travail en train de se terminer. Avec tout le respect que je dois au jury, j’ai une analyse un peu différente que je voudrais partager avec vous.

Si tu veux savoir où tu veux aller, tu dois d’abord ne pas oublier d’où tu viens

Une carrière, c’est effectivement une expérience, et donc un passé qui, en ce qui concerne mon rôle dans la construction du Groupe BANK OF AFRICA, remonte à 1981. Presque 30 ans. C’est un long bail. Lorsqu’on regarde aujourd’hui ce que représente en Afrique notre réseau bancaire, son étendue géographique, sa santé financière, ses activités en diversification constante, il y a en effet de quoi être fier du chemin parcouru. Il existe au Mali un proverbe bambara qui dit : « Si tu veux savoir où tu veux aller, tu dois d’abord ne pas oublier d’où tu viens ». Je n’ai jamais oublié nos débuts : comment une poignée d’hommes, tous africains à l’exception de moi-même,  ont réussi à en entraîner quelques centaines d’autres pour créer « ex nihilo » au Mali une banque à capitaux entièrement africains et totalement privés, alors que ce secteur était considéré jusque là, au moins en Afrique francophone, comme une chasse gardée de quelques grandes banques étrangères pour des raisons autant techniques que financières, et comment ensuite nous avons su montrer que ça marchait. Le pari était plus que risqué, nos moyens plus que modestes et il est quasiment certain qu’une telle aventure serait totalement impossible à reproduire aujourd’hui selon le même schéma. C’est sans doute à cause de tout cela que nous sommes toujours restés prudents et discrets. Mais nous avons tenu et nous avons gagné ce premier pari. Il a été suivi de trois autres initiatives audacieuses : commencer à reproduire l’expérience dans d’autres pays dès 1989, sortir de la zone franc en 1999, nous introduire en Afrique anglophone depuis 2004. Durant toute cette construction, le Groupe BANK OF AFRICA a certes connu quelques changements, mais notre philosophie initiale a toujours été maintenue et vigoureusement défendue : démontrer aux yeux de tous qu’un réseau bancaire d’origine africaine peut appliquer le professionnalisme exigé par nos Autorités et nos clients, souvent mieux répondre aux besoins de ceux-ci que des acteurs étrangers, grandir sur de nombreux pays, s’ouvrir beaucoup de partenariats, tout en restant fidèle à ses principes originels.

 

Aujourd’hui, votre prix me confirme que cette démonstration est faite et bien faite. Mais atteindre ce résultat n’a pas été, et n’est toujours pas, un long fleuve tranquille. Les vingt huit années passées sur ce chemin ont été en permanence des années de luttes, d’incertitudes, de doutes. C’est pourquoi, de toute cette histoire vécue, je retiens moins des chiffres, qui s’effacent comme le vent, qu’une passionnante aventure humaine. C’est pourquoi aussi, même si l’honneur me revient aujourd’hui en tant que premier responsable du Groupe BANK OF AFRICA, je voudrais dédier ce prix à tous ceux qui ont permis que ce jour existe. A mes parents, pour les valeurs qu’ils m’ont transmises. A mon épouse, pour sa présence constante à mes côtés dans toutes les circonstances. A tous les actionnaires et Administrateurs du Groupe, pour leur confiance toujours renouvelée. Et, surtout, aux 2700 personnes, femmes et hommes, qui constituent à ce jour les équipes des sociétés du Groupe et le bâtissent au quotidien, et plus spécialement aux quelque 70 personnes qui, à mes côtés, à travers notre assistance technique, sont les principaux animateurs de ces équipes et participent à la transformation et à l’amélioration permanente du réseau BANK OF AFRICA. Ce prix est aussi le leur.

Mais l’honneur qui accompagne votre distinction m’encourage aussi à aller plus loin et à considérer que le Groupe BANK OF AFRICA n’est, en cette fin 2009, qu’à l’aube des nouvelles étapes de sa saga.

D’abord nous avons lancé en 2008, les premiers à ma connaissance en Afrique, un nouveau défi en nouant une alliance stratégique avec la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE). Cette alliance Sud –Sud et francophone constitue une originalité supplémentaire dont nous sommes fiers. Ses débuts sont particulièrement prometteurs si j’en juge par les résultats déjà atteints. Dans le même temps, nous avons confirmé les ambitions d’une implantation continentale de notre réseau bancaire. Nous ne faisons pas la course pour être présents partout dans les délais les plus brefs, car nous privilégions la solidité et la synergie de nos entités existantes. Mais nous sommes fermement décidés à faire figurer la BANK OF AFRICA parmi les banques qui, dans moins de 10 ans, constitueront les leaders d’un système bancaire africain qui sera à cette date complètement transformé.

Il faut en Afrique faire la banque autrement

De plus, nous sommes convaincus que ce nouveau système bancaire doit aussi prendre en charge une profonde révision de son approche pour assumer ses responsabilités, dans un continent où tant de chantiers financiers n’ont pas encore de solution satisfaisante. A la BANK OF AFRICA, nous croyons fondamentalement dans l’émergence de l’Afrique. Cependant, pour que le potentiel devienne réalité, notre continent  a besoin de réflexions, mais aussi d’inventions et d’actions. Cela vaut également pour notre secteur  Il faut en Afrique faire la banque autrement. C’est à cette seule condition que des besoins primordiaux comme, par exemple, le financement de l’habitat ou celui des petites entreprises seront mieux satisfaits sur notre continent. Les banques ne peuvent bien sûr être les seuls inventeurs de ces mutations, mais elles doivent en être des catalyseurs et des acteurs importants. En la matière, nous souhaitons aussi apporter notre meilleure contribution et figurer parmi les pionniers. J’espère que nos alliés institutionnels, qui nous ont toujours soutenu jusqu’ici, seront encore à nos côtés dans cet autre challenge.

Voila, Mesdames et Messieurs, comment j’apprécie notre passé et comment je vois notre avenir. Je sais que nos équipes sont enthousiastes pour engager ainsi leurs forces dans ces nouveaux combats. J’ai également pleine confiance sur leur capacité à les gagner. Je vous promets donc de nouvelles avancées et je vous donne rendez-vous,  dans 10 ans par exemple, avec la BANK OF AFRICA, pour dresser un nouveau bilan du chemin encore parcouru.

Pour l’heure, permettez-moi seulement de vous remercier tous et de vous redire combien je suis heureux.

Paul Derreumaux

 

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